Personne ne t'a condamnée !

Publié le par Relais Famille

Chantiers revue des fils de la charité  n◦145 avril 2005

 

Personne ne t'a condamnée!

 

Claude, aumônier de prison, a créé une structure d'accueil pour les familles affectées par l'incarcération d'un des leurs.

Les souffrances des familles de détenus

Durant la dizaine d'an­nées où j'ai exercé mon ministère dans une pri­son de Montréal, j'ai bien souvent été sensibilisé aux impacts de l'incar­cération sur les familles des prisonniers, sur la vie des personnes qui leur étaient les plus proches.

Par exemple, j'ai constaté certains jours que les visiteurs éprouvaient un fort malaise à venir rencon­trer les leurs en prison parce qu'ils devaient endurer de la part de certains membres du personnel l' arro­gance et le mépris accordés pmfois à la population carcérale elle-même. Il arrivait aussi qu'un gars me parle de sa mère qui, au cours de longues années, avait fait comme lui la tournée des établissements du Québec pour lui rendre visite. Ou bien, d'autres me montraient une photo d'enfant, me dévoilant ce qu'ils affirmaient être leur seule raison de survivre, de ne pas s'enlever la vie. Il arrivait également que des mères ou des conjointes communiquent avec l'aumônier, découragées du comportement de leur homme et ne sachant plus comment faire face à la situation. Il y avait ces jours où j'étais heurté par l'attitude de prisonniers qui traitaient leurs conjointes avec violence, s'accordaient le droit de contrôler leurs allées et venues et les mettaient à leur service de façon narcissique, se percevant eux­ mêmes comme des victimes auxquels tout était dû. Et puis, il y avait ces heures terribles où il fallait annoncer la mort par suicide du conjoint ou du fils.


To

 


To


To

us ces signaux enregistrés semaine après semaine, et parfois intensément ressentis m'ont pro­voqué à penser que les proches des personnes incar­cérées vivaient une situation particulière qui appelait une aide pm1iculière, un soutien spécifique.

 


Naissance de Relais Famille
 

 Au service de la pasto­rale où je partageais la tâche avec une autre per­sonne, nous n'avions ni le temps ni les énergies nécessaires pour nous impliquer avec les familles. D'ailleurs, nous aurions pu difficilement nous impli­quer comme confidents et accompagnateurs des uns et des autres. Nous nous sentions impuissants face à cette souffrance. De là est né, tout naturellement, le désir de m'engager en faveur des familles des pri­sonniers le jour où je prendrais ma retraite.  

Lorsque Relais Famille a vu le jour à l'automne 1998, il n'existait au Québec aucun autre organisme qui soit intégralement et exclusivement destiné aux proches des personnes incarcérées. Et c'est le cas, encore aujourd'hui. L'entreprise demeure modeste; elle n'a vécu jusqu'à maintenant que de contribu­tions financières privées, provenant principalement de communautés religieuses. Elle a profité du travail d'une employée à temps plein, ou de deux personnes à temps partiel, et de l'engagement d'un petit groupe de personnes bénévoles. Relais Famille vient de recevoir une première subvention (non récurrente) de l'État, et déploie beaucoup d'efforts à la pour­suite d'un financement public régulier qui atteindrait 60 % de son budget.

Malgré l'incertitude chronique qu'elle a assumée
quant à son avenir, l'intervention s'est précisée peu à peu. Une pratique s'est développée. Une expérience s'est acquise.

Ici on ne sent pas le poids de la honte

À l'endroit de sa popula­tion-cible Relais Famille se définit comme un groupe d'entraide, tout autant qu'un service: Relais Famille veut favoriser la survie, le bien-être, la croissance des personnes et des familles affectées par l'incarcération d'un(e) des leurs.  

 Relais Famille veut permettre aux personnes de sortir de r isolement en leur fournissant un lieu d'écoute, de support et d'entraide: assistance télé­phonique et rencontres diverses.  

Relais Famille veut leur donner l'occasion de par­tager leurs forces, leurs talents et leurs expériences.

Relais Famille veut leur offrir une socialisation positive par des activités diversifiées.

Relais Famille veut aussi favoriser la réinsertion sociale éventuelle des proches qui sont actuellement incarcérés.

Dans le témoignage des personnes qui ont che­miné avec le réseau de Relais Famille, il y a une constante qui revient infaimblement: «On trouve ici du monde qui ne nous juge pas, on ne sent pas ici le poids de la honte. »

 Quelle joie j'éprouve, quant à moi, lorsque je constate que, par mon implication avec les autres dans Relais Famille, j'ai pu contribuer à soulager quelqu'un du fardeau de la honte, d'un jugement qui n'a pas sa raison d'être.

 

 

 

Le regard des autres qui fait mal

 

 

 

Publié dans Revue de presse

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article